26 avril 2022
Avec 9 titres aux noms toujours plus doux : la dame au balcon, des diamants dans l’eau ou encore la pâtisserie, Pierre Gisèle nous transporte dans son univers avec Distorsion, son premier album solo. De son vrai nom Ornella, l’artiste bordelaise a accepté de nous donner une interview.
Pierre Gisèle c'est un nom de scène, est ce que tu peux te présenter toi, Ornella ? Nous parler de toi ?
Je m'appelle Ornella, je vis à Bordeaux, je travaille dans un lycée à mi-temps quand je ne fais pas de la musique. Et quand je ne travaille pas dans ce lycée, je traîne au parc avec mon chien et je bois des bières avec mes copains en ville. On dirait un peu que je décris la vie d'un punk à chien alors que pas du tout. Ouais c'est ça en plus mignon.
Est-ce que tu peux présenter ta musique en quelques mots comment tu la qualifierais ?
Elle est sincère, mignonne et pas toujours mignonne voilà.
D’où est-ce qu’il vient ton nom de scène ?
C'est le nom de mes grands-parents. Puisque j’avais fait un petit EP pour eux, c’était mon premier, je leur ai emprunté leurs prénoms pour mon nom d’artiste.
D'où vient cette passion ? Qu'est-ce qui t'a donné envie de faire de la musique ?
J'ai toujours beaucoup beaucoup aimé la musique. Ça a toujours été un art dans lequel j'arrivais à m'évader, que je sois triste ou heureuse enfin peu importe les émotions que je ressentais, j'aimais bien les vivre avec la musique en tant qu’auditrice. Après, j'ai, autour de moi, beaucoup de personnes qui font de la musique. Je suis amie avec la team du Flippin’ Freaks, c'est un collectif bordelais. Comme on traîne beaucoup ensemble et qu’ils faisaient beaucoup de musique et que je les ai vu autour de moi s'épanouir là-dedans, ça m'a donné envie. Sachant que je vivais avec Alexis Deux-Seize, l’un des fondateurs de l’association, et étant donné qu'il en faisait tout le temps à la maison, de la musique, c'est arrivé quoi.
Dans ton album Distorsion, sorti en janvier dernier, qu'est ce qui t'a inspiré ? Quel thème t'as voulu aborder ?
Il n'y a pas vraiment de thème. C'est plus les émotions que je ressentais sur l'instant quoi. Les premiers morceaux ont été écrits à la même période et ouais, c'est vraiment mes émotions de ce qui s'est passé à l’instant T quoi.
Justement, pour rejoindre ce que tu viens de dire, ton album, tu l'as écrit rapidement ou il y a des textes que t'avais écrit il y a longtemps et que t'as voulu mettre dedans ? Comment ça s’est passé ?
Non pas du tout, je ne fonctionne jamais comme ça. Je n'ai jamais de texte qui traîne et que je ressors six mois après. Je vois vraiment la musique comme un peu un moyen d'exorciser des maux ou de la joie aussi pas que des maux d'ailleurs. C'est vraiment important pour moi que ce soit toujours hyper sur l'instant quoi.
Quelle est l'histoire derrière la pochette de ton album ? Qu'est-ce que t'as voulu dire ?
J’ai pas du tout géré la pochette mon album. C'est un copain qui s'appelle Tom Caussade, qui est le batteur des Stoner Bud’s, qui a fait ma pochette. Et c’est comme la première pochette de mon EP La soupe aux étoiles, j'aime bien partager l’art, que ce soit un peu pluridisciplinaire, déjà que les chansons sont très centrées sur moi et mes petites émotions. J’aime bien pouvoir partager ça et pouvoir confier le bébé à d’autres artistes pour les tâches qui ne parlent pas de mes émotions. Par exemple, c’est Hugo Carmouze qui a complètement fait la production, le mastering, le mixage, et qui a choisi même l’ordre des morceaux. J’étais en mode : tiens mec, ça, c’est ta partie ça ne me concerne pas, c’est en dehors de la composition. Et pour la pochette, j’ai contacté Tom et je lui ai dit : voilà, mon projet, il parle de ça, j’ai ressenti ça quand je l’ai fait, lâche toi pour la pochette. Je suis très contente, je lui ai fait confiance et puis il a donné. Franchement, c’est hyper représentatif de ma musique.
Avec quel artiste aimerais-tu collaborer ? Ton featuring de rêve, il sera avec qui ?
C'est pas la première fois qu'on me pose cette question et je ne sais jamais trop quoi répondre. Je pense que mes featurings que j’aime faire, c’est avec mes copains en fait. C’est des artistes et des humains que je respecte et que j’admire gavé. Je n’ai jamais en tête l'idée de me dire : wow si j’étais à New York ou si j’étais à Paris, j’aimerais trop faire un feat avec cette personne. Je ne suis pas trop du genre à fantasmer les trucs, j’aime bien les choses concrètes, les choses sincères, les choses directes, simples. Donc ouais, les collabs que j’aime bien, c’est avec mes potes et en général, on en parle et un jour, elles arriveront ou alors elles sont déjà faites ou elles sont juste pour l’instant pas sorties.
Dans ton album, c’est quoi le morceau que tu préfères ? Qu’est-ce qu’il a de particulier par rapport aux autres ?
Je les aime tous franchement. J’ai tendance à dire que c’est Distorsion Harmonique parce que c’est le premier, j’aime bien la mélodie et tout, elle est cool, je dirais que c’est celle-là. Et Tous Les Policiers quand même.
Justement, la dernière chanson de l'album Tous Les Policiers, tu dénonces que “tous les policiers sont mauvais” et que pendant le confinement, ils n'arrêtaient que “les clochards et les gens typés”. C'est un sujet dont tu avais envie de d'aborder depuis longtemps ou il y a un moment particulier qui a fait germer ce titre ?
Toujours pareil comme je te dis, c'est vraiment sur l'instant. En fait, pendant le confinement, c'était hyper chiant parce qu’il y avait les dérogations qu'on devait écrire - complètement absurde ce truc parce que tu pouvais t'en faire cinq dans la journée -. On était en ville et à force de parler avec mes copains, on se rendait compte que quand c’était des potes blancs, en couple, trop mignon, habillés comme des bourgeois, ils sortaient sans dérogations et ils n'en avaient rien à faire parce qu’ils savaient que la police n'allait jamais les contrôler. Alors que moi, quand je sortais à Saint-Michel (un quartier de Bordeaux ndlr) où il y a plus de gens racisés, là bizarrement, la police faisait tout le temps des contrôles. Et moi, comme je suis de couleur, je n’osais jamais sortir sans une dérogation. J’ai réalisé que c’était complètement absurde et qu’en fonction des quartiers où je marchais dans Bordeaux [...] je me rendais compte que c’était pas du tout la même ambiance et ça me mettais en colère. Donc j’ai écrit cette chanson sous la colère du moment.
Dans l'album, même quand tu parles de thèmes de société importants - on vient de le voir - mais aussi dans le son Je vais mieux où tu parles de la dépression “j'avais envie de mourir maintenant je vais mieux”, tu gardes un air léger, quasi enfantin, est-ce qu’on peut dire que c’est ta marque de fabrique ?
Je ne pense pas que ce soit ma marque de fabrique, mais je suis quelqu'un de sarcastique. Donc j'ai quand même tendance à, souvent, parler au deuxième voire troisième degré et je pense que c'est pour ça dans des sujets qui sont aussi importants que la dépression ou que les violences policières, c’était important pour moi d’y mettre un air hyper mignon pour appuyer le fait que ce soit hyper grave. Plus je vais dans le mignon plus, pour moi, ça touche quelque chose de gravissime et d'important quoi.
Qu'est-ce qu'on peut attendre de ta musique dans le futur ? Qu'est-ce qui va arriver prochainement ?
J'ai commencé à écrire un autre album Pierre Gisèle, ça fait déjà un petit moment, tranquillement, je ne me presse pas. Et avec mon groupe - j'ai un groupe qui s'appelle Teeth - on est cinq et on a enregistrer un album en septembre dernier donc là ça y est, il est fini et il va sortir à la fin de l'année, on espère. On a hâte, on prépare une tournée, on est hyper content et hyper excité de sortir cet album.
Propos recueillis par Emma Grandjean